Ivan Smolensky

Le président a disparu


le président a disparu, chapitre 1, extrait

CHAPITRE 1er

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Les dessous d’un coup d’Etat

La situation était complexe. Quelques années auparavant le Président avait été élu à une forte majorité face au sortant qui pendant toute la durée de son mandat avait tenté de réformer le pays. Mais les critiques continuelles de l’Opposition et l’influence des Médias, hostiles pour la plupart, avaient affaibli ce gouvernement qui avait dû gérer une cascade de crises mondiales, affaiblissant sa notoriété et lui faisant perdre les élections. Son successeur avait le verbe facile et les promesses d’un changement radical avaient emporté la décision.

 

Mais la réalité des crises économiques et politiques s’accommodait mal avec les intentions affichées. Très vite les promesses illusoires avaient entraîné un effondrement économique. Les investisseurs avaient fui et une vague de délocalisations avait conduit le chômage à un niveau jamais atteint. Les grèves étaient continuelles, le mécontentement quasi général et le pays s’était vite retrouvé isolé et en quasi faillite.

 

Un des partis du Centre, rallié à sa candidature, avait été le premier à claquer la porte, dénonçant l’incapacité d’un pouvoir qui avait échoué.

Le concert des Médias s’état d’abord fait discret puis franchement hostile. Dans son camp les critiques devenaient acerbes et très vite des tractations s’étaient engagées avec les perdants d’hier pour tenter de trouver une solution à cet effondrement  général. Privé de soutiens, le Président avait dû démissionner, officiellement pour raisons de santé mais personne n’était véritablement dupe.

Le régime avait vécu et les deux camps, jadis rivaux et opposés n’avaient trouvé d’autre solution que la fusion des partis avec des élections dont était sorti largement vainqueur, le Président Serge Kovdoski, provenant de l’aile droite du nouveau parti : le Mouvement Démocratique National. Son adversaire perdant, Marcelin Duvalier, provenait d’un rassemblement hétéroclite des groupuscules révolutionnaires hostiles au rassemblement qui s’était opéré pour former le M.D.N. Le résultat avait été sans appel, soit à peine 40% des suffrages.

Pourtant ces 40% pesaient lourds dans la balance car plus d’un électeur sur deux n’avait pas voté et Duvalier ne s’était pas privé de dénoncer une campagne de la majorité qui avait marginalisé le groupe révolutionnaire. Les abstentions avaient été nombreuses, ce qui en langage gauchiste voulait signifier que beaucoup de ces abstentionnistes rentraient dans la catégorie des sympathisants. Cela justifiait de continuer la lutte. L’un des leaders gauchistes, avait pris la tête du mouvement en rassemblant tout ce monde pour officialiser ce nouveau parti, baptisé : l’Entente Prolétarienne.

David RAPCHIN, à 70 ans avait derrière lui une longue carrière révolutionnaire commencée en Mai 1968, étant encore au lycée. De taille moyenne, les cheveux gris toujours en bataille, habillé suivant l’instant, c’est-à-dire avec n’importe quel vêtement un peu défraichi et d’une propreté incertaine, il représentait l’archétype du révolutionnaire de base pour lequel seul reste primordial la parole et la maitrise de la dialectique. Il faut reconnaître qu’il excellait dans ce domaine et qu’il pouvait haranguer une foule pendant des heures.

 

Il affectionnait tous les grands révolutionnaires, Lénine, Trotski, Beria, Mao mais ce qui le fascinait, c’étaient les grands ténors de la Révolution Française. Il n’hésitait pas à avouer que la Terreur l’inspirait particulièrement : la facilité avec laquelle on exécutait tant de monde en si peu de temps. Les Robespierre, Fouquier-Tinville avaient été les précurseurs des Pol Pot et autres du même acabit. N’étant pas physiquement d’une grande force, il compensait cela par l’éloquence et un sens de la Méthode.


14/05/2013
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